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Pascal Canfin : « Je veux promouvoir le concept d’agriculture écologiquement intensive »

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L’aide française aux pays émergents, sa conversion au développement durable, la transparence des transactions financières. Interview de Pascal Canfin, ministre délégué au développement, publiée dans le Monde du 12 octobre 2012.

Propos recueillis par Alain Faujas et Gilles van Kote


Pascal Canfin, ministre délégué au développement, est, avec Cécile Duflot, l’autre représentant écologiste au sein du gouvernement. Il dit vouloir fusionner les notions de développement économique et de développement durable.

Vos prédécesseurs étaient ministres de la coopération. Pourquoi êtes-vous devenu ministre du développement ?

C’est la conclusion d’une séquence historique engagée depuis trente ans. La mondialisation a signé la fin d’une relation fondée sur le passé colonial et a rendu indispensable un nouveau partenariat avec l’Afrique. Ministre écologiste du développement, je peux consacrer 100 % de mon temps à une politique qui incite les pays les plus pauvres à adopter un mode de développement soutenable. Autrefois, développement économique et développement durable étaient deux notions distinctes. Il faut les fusionner.

Qui l’aide française doit-elle privilégier ? Les plus pauvres ou les plus dynamiques ?

Il s’agit d’un faux débat. Quand nous intervenons dans les pays émergents, nous le faisons sous forme de prêts. Ainsi la Chine ne reçoit plus d’argent du contribuable français, mais l’Agence française de développement (AFD) lui prête des fonds pour décarboner son économie, car il est important – en Chine comme en France – qu’on protège le bien public mondial qu’est le climat.

En revanche, quand nous intervenons en matière d’éducation, de santé ou de lutte contre la pauvreté en Afrique, nous le faisons à travers des dons.

La France a choisi de faire passer par l’Union Européenne une grande partie de son aide aux pays les plus pauvres : 20 % des financements européens sont français.

La France a une politique de dons de plus en plus parcimonieuse. Qu’en pensez-vous ?

François Hollande a promis durant sa campagne électorale que les dons bilatéraux seraient remontés à leur niveau de 2007. Cette promesse sera tenue.

Il s’était aussi engagé à augmenter la part de ces dons confiée aux organisations non gouvernementales. Le montant dont celles-ci recevront la responsabilité augmentera dès 2013 et passera de 45 millions à 90 millions d’euros d’ici à la fin du quinquennat.

A quoi l’échec de l’économie verte au sommet Rio +20 est-il dû ?

Pour les pays pauvres, ce n’est pas la priorité. Les pays émergents ne veulent pas se faire imposer de modèle. Quant aux pays riches, ils éprouvent le plus grand mal à s’engager dans la voie d’une transition écologique et à financer celle-ci.

Nous sommes dans une situation de blocage. Mon rôle est d’identifier ceux qui, dans le monde en développement, pensent autrement et estiment que le développement durable n’est pas un luxe réservé aux pays riches.

Comment cela se traduira-t-il dans votre politique ?

Nous avons réorienté la politique énergétique de l’AFD. Pour les trois prochaines années, les investissements dans ce domaine, soit de 5 à 6 milliards d’euros, auront pour priorités les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et la décarbonisation. Par ailleurs, je veux promouvoir le concept d’agriculture écologiquement intensive. Il faut, au Sud, augmenter la production agricole, mais pas n’importe comment.

Et, alors que les projets d’investissement de l’agence sont étudiés par un comité d’engagement qui évalue uniquement les risques financiers, l’AFD va se doter d’un deuxième comité qui évaluera les projets à partir de critères sociaux et environnementaux. Nous souhaitons que ces critères soient mieux intégrés dans les appels d’offres des bailleurs.

Quelle sera la part des recettes de la taxe sur les transactions financières affectée à l’aide aux pays pauvres ?

Le président de la République a confirmé, le 25 septembre, devant l’Assemblée générale des Nations Unies, ce qu’il avait annoncé lors de la campagne électorale, à savoir qu’au moins 10 % de la taxe française sur les transactions financières seraient affectés au développement et à la lutte contre les fléaux sanitaires et les pandémies. Cela représentera environ 160 millions d’euros.

A quoi serviront les Assises du développement et de la solidarité internationale annoncées par le premier ministre ?

Cela fait quinze ans qu’il n’y a pas eu sur le sujet un dialogue de cette ampleur. Il s’agit de réunir tous les acteurs du développement pour discuter de la façon de mettre la politique française de développement au service du développement durable.

Que vous inspirent les négociations européennes sur la transparence des transactions financières ?

Les optimisations fiscales des entreprises font perdre aux budgets des pays en développement dix fois le montant de l’aide que ceux-ci reçoivent. Une directive initiée par le commissaire européen Michel Barnier est en cours de négociation afin d’obliger les entreprises européennes à publier, pour chaque pays, ce qu’elles gagnent et ce qu’elles paient comme impôts.

Renforcer la capacité des Etats du Sud à collecter l’impôt est fondamental, car la finalité de l’aide publique est de s’éteindre : il faut que ces Etats en aient de moins en moins besoin.

Auteur : EB1962

Militant EELV, élu municipal à Rosny-sous-Bois

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