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Gestion des déchets : en finir avec les demi-mesures

37% seulement des déchets français étaient recyclés en 2011. Bien loin des pays du Nord de l’Europe qui atteignent les 50%. La faute à la frilosité des décideurs politique, selon un rapport du Commissariat général au développement durable.

Article de Gilles van Kote, paru dans LE MONDE, le 11.06.2013

Est-ce vraiment un paradoxe ? Alors que la France compte parmi les fleurons de son économie deux groupes de dimension internationale présents dans le secteur des déchets, Veolia et Suez Environnement, ses performances en matière de gestion des déchets la placent au milieu du peloton européen. Avec un taux de recyclage et de compostage de ses ordures ménagères de 37 % en 2011, selon les dernières statistiques disponibles, elle est légèrement au-dessous de la moyenne communautaire (40 %), et bien loin des pays d’Europe du Nord, qui frisent ou dépassent les 50 %.
La faute, en premier lieu, à un taux de mise en décharge de 28 %, quand les pays les plus vertueux ont quasiment éradiqué ce mode de traitement, classé bon dernier dans la hiérarchie européenne définie par la directive sur les déchets de 2008. Certains experts du secteur n’hésitent pas à faire un lien entre cette situation et les marges réalisées par les opérateurs sur le stockage des déchets.
Un rapport du Commissariat général au développement durable, rendu public fin mai, dénonce entre les lignes la frilosité de la politique française en matière d’ordures ménagères. Le rapport s’intéresse à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), principal outil fiscal à la disposition de la puissance publique. Les auteurs s’appuient sur une étude de 2012 de la Commission européenne qui établit – somme toute logiquement – une nette corrélation entre le taux des taxes appliquées à l’incinération ou au stockage et le pourcentage de déchets ménagers recyclés ou compostés.
En résumé : plus on taxe les modes de traitement considérés comme les moins vertueux du point de vue environnemental, plus on favorise le développement des solutions alternatives comme la prévention, le réemploi, le recyclage ou la valorisation organique. C’est ce que les spécialistes appellent le « signal prix ».
La France a fait un pas en avant avec la loi de 2009 dite Grenelle 1, qui fixe des objectifs de réduction de la production de déchets, de réduction de la part des déchets mis en décharge ou incinérés en 2012 et le passage à 45 %, en 2015, du taux de recyclage et de compostage. Pour y parvenir, la loi prévoit une hausse régulière de la TGAP sur la mise en décharge et son extension à l’incinération, jusqu’alors épargnée.

Faiblesse des taxes sur l’incinération et les décharges
Or le rapport constate que seulement 10 % des tonnages de déchets stockés et 3 % des tonnages incinérés sont soumis au taux plein de la TGAP. Pour des raisons sans doute excellentes, notamment l’amélioration des performances énergétiques et environnementales des installations, les modulations et exemptions sont devenues la règle. Résultat :  » Le taux effectif moyen pour le stockage est de 14,6 euros la tonne lorsque le taux plein est de 20 euros et pour l’incinération de 2,9 euros la tonne pour un taux plein de 7 euros. » Aux Pays-Bas, la taxe sur la mise en décharge dépasse les 100 euros la tonne, où ce mode de traitement a presque disparu.
Un signal insuffisant
« Le signal prix donné par la TGAP reste insuffisant », conclut le Commissariat général au développement durable, dans un appel implicite à augmenter les taux de la TGAP et à limiter les modulations et exemptions. Tout en notant les progrès effectués en matière de prévention et d’extension de la redevance incitative, le rapport souligne que »certaines thématiques comme le tri des déchets des entreprises ou la valorisation des déchets du bâtiment et des travaux publics sont clairement en panne ».
Le message est clair : fini le temps des demi-mesures. S’il faut considérer les déchets comme des ressources à valoriser et non comme des rebuts à éliminer, la France doit passer à la vitesse supérieure.

Créer un 3e flux de tri pour les biodéchets non souillés
Cela tombe à pic : un des cinq chantiers de la conférence environnementale organisée par le gouvernement les 20 et 21 septembre sera consacré à l’économie circulaire, et notamment au recyclage et à la valorisation des déchets. Et une loi-cadre sur l’économie circulaire, actuellement en préparation au ministère de l’écologie, devrait suivre.
Voilà un domaine où, avec un peu de volonté politique, on peut faire preuve d’audace. Un exemple : la collecte séparée des biodéchets, ou déchets organiques. En France, ceux-ci représentent un tiers du poids des poubelles des ménages et finissent la plupart du temps incinérés ou enfouis, alors qu’ils peuvent produire de l’énergie grâce à la méthanisation ou fournir un amendement organique après compostage.
Seules 90 collectivités françaises pratiquent aujourd’hui le tri et la collecte séparée, selon le Centre national d’information indépendante sur les déchets (Cniid) qui a lancé une campagne sur le sujet le 4 juin. Pourtant, cette méthode semble la plus indiquée pour obtenir des biodéchets non souillés, des installations de méthanisation performantes et du compost répondant aux normes européennes, actuellement en cours de révision. Mais la crainte d’une augmentation des coûts et de la complexité de la mise en place d’un troisième flux de tri – en plus des recyclables et des ordures résiduelles – en freine la généralisation. Celle-ci constituerait pourtant une étape historique dans la gestion des déchets en France et un geste politique susceptible d’emporter l’adhésion des citoyens. Encore faut-il être prêt à bousculer quelques vieilles habitudes. Chiche ?

Auteur : EB1962

Militant EELV, élu municipal à Rosny-sous-Bois

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